L’avant
Avant de connaître la Communication NonViolente (CNV), ma vie était simple. Elle était certes (très) brumeuse, mais simple.
Je séparais d’un côté les gens « sympas », ceux qui me souriaient, m’estimaient, et avec qui je me sentais à l’aise, et de l’autre, les gens « pas sympas », ceux que je ne comprenais pas, qui m’étaient parfois agréables et d’autres non et qui ne me prêtaient pas d’attention particulière, pensais-je alors. Oh bien sûr, j’avais parfois envie de les atteindre, mais la peur d’être rejetée et jugée était bien trop forte.
Parfois, certaines personnes pouvaient passer du clan des « sympas » à celui des « pas sympas » au détour d’une remarque désagréable, d’une dispute, ou d’une déception.
Cette façon de fonctionner avait vraiment ses avantages : elle me permettait d’éviter de me poser des questions sur ce que je ressentais et de rejeter la faute sur l’autre.
Ma prof d’allemand me tape sur le système ? (oui j’ai eu beaucoup de difficultés avec mes profs d’allemand, pas parce que j’exécrais cette matière, non : c’étaient ELLES !) Qu’est-ce qu’elle est irritante !
Une dispute avec mon copain ? Il est vraiment insupportable, c’est vraiment de sa faute si on se dispute ainsi !
Un certain malaise
En réalité, cette façon de fonctionner ne collait pas avec le vivant autour de moi. J’étais souvent mal à l’aise avec les autres. Je voyais bien que parfois, je pouvais me sentir blessée par des personnes « sympas », et que j’étais parfois frustrée de ne pas être amie avec les « pas sympas ». Finalement, je m’isolais dans un monde fait de bien et de mal qui ne correspondait pas au monde réel.
En plus de cela, j’avais du mal notamment à être contredite, car je confondais « être d’accord avec quelqu’un » et « aimer quelqu’un ». Cela me coupait souvent des autres.
La découverte de la Communication NonViolente (CNV) en formation
En arrivant à ma première formation en module 1, j’avais tout compris de la CNV. J’avais lu des livres, vu des conférences, vu quantité de vidéos. C’était le module 1, qui permet entre autres de clarifier et exprimer ce qui se passe en soi (sentiments et besoins). J’arrive donc très à l’aise sur un exercice en groupe de 3 que l’on appelle « piste de danse » où je parle d’une de ces disputes avec mon copain (où bien sûr, il avait tort et j’avais raison) : « Quand tu me dis ça, je me sens énervée car j’ai besoin de respect et d’autonomie ! » Et paf, voilà, processus intégré, emballé c’est pesé, en 2 minutes.
Je vois les deux autres personnes de mon petit groupe me regarder, dubitatives, et qui me demandent de recommencer plus lentement. (OK les pauvres, elles n’ont pas très bien compris ce qu’est la Communication NonViolente, je vais leur remontrer doucement pour qu’elles comprennent mieux). Je refais la même donc. Je les vois qui appellent la formatrice. Un peu irritée, je refais la même devant la formatrice pour qu’elle leur explique que J’AI RAISON BORDEL !
Et là, je vois la formatrice qui me demande une nouvelle fois de recommencer, avec elle cette fois. « Quand tu me dis ça, je me sens énervée… » La formatrice m’arrête et me demande de prendre le temps de me remettre dans la situation, et de sentir dans mon corps ce que je ressentais vraiment à ce moment là. Elle pose la main sur moi, elle est calme, bienveillante, présente. Je prends le temps de me remémorer la situation, les émotions que j’ai ressenties. Et là, je m’effondre en pleurs, sans comprendre ce qui m’arrive. J’arrive à dire entre deux sanglots « Je me sens triste… ».
La formatrice m’invite à explorer mon besoin. Submergée par l’émotion, je n’arrive pas à le trouver. Elle me suggère : « Est-ce que tu as besoin de lien avec ton copain ? » Et là, je m’effondre en pleurs. De nouveau, elle a vu juste.
La prise de conscience
Je sors de cette expérience et de ce premier stage bouleversée. Je comprends que pendant toutes ces années, j’étais coupée de mes émotions et de moi-même. Qu’en séparant les gens en catégories, je me protégeais d’une façon relativement inefficace, mais que surtout je me coupais du lien que j’aurais pu créer avec eux. Vouloir avoir raison était un moyen de me rassurer sur ma valeur et me coupais d’une relation riche avec les autres.
Aujourd’hui, j’ai progressé. Je ne classe plus les gens en catégories, et il m’arrive même de ne pas vouloir avoir raison à tout prix. Bien sûr, le premier réflexe quand quelqu’un fait quelque chose qui ne me convient pas est de le classer en « pas sympa » (bon j’avoue, les mots que j’utilise sont légèrement plus épicés en réalité !).
Puis, en clarifiant mes besoins, en transformant certaines croyances limitantes, en dialoguant, petit à petit, j’arrive à recréer le lien et le résultat est souvent savoureux ! Mais cela fera l’objet de prochains posts !
Merci Nathalie pour ce beau témoignage qui me rejoint dans mes premières expériences de CNV et encore aujourd’hui dans les difficultés qu’il m’arrive encore de vivre pour me connecter à mes sentiments et ensuite mes besoins. J’ai souvent besoin de soutien pour cela. Mais le résultat est si fort et doux à la fois…que je n’y résiste pas.
Plein de tendresse pour toi et nous tous qui ré-apprenons à parcourir ce chemin, parfois nous tombons mais c’est comme ça que nous apprenons ! Comme disait Marshall : « Je vais vous apprendre à parcourir le chemin le plus long, celui entre votre tête et votre coeur ! »
Et merci Fabienne pour tes commentaires qui font vivre ce blog 😉
Merci pour ce post éclairant sur ce que nous vivons/traversons/pratiquons en stage CNV.
Juin 2015… Premier module, première piste de danse… dans mon petit groupe, il nous était difficile de ne pas aller tout de suite aux stratégies pour « aider » la personne qui faisait sa piste de danse (petit sourire rien que d’y repenser ^^) Et nous avions beaucoup travaillé sur les observations simples, non teintées de jugements, aïe aïe aïe… les jugements/interprétations se cachent partout, y compris dans le ton de notre voix ou nos expressions corporelles 😉
Revenir à nos besoins à chaque petit moment, dans nos activités quotidiennes, etc. une belle clé pour cheminer 🙂
Merci Nathalie pour ce témoignage qui m’a reconnecté à mes propres souvenirs et qui me permet de mesurer le chemin que j’ai parcouru pour me sentir en vie et en lien avec moi et les autres. J’ai été touchée par « tes pleurs » qui me rappellent combien il m’est encore parfois difficile d’accueillir ma vulnérabilité et le cadeau caché derrière : mes besoins.