Se former à la CNV… et après ?
Lors de mes formations, je rencontre parfois des personnes qui ont commencé à se former en CNV et qui ont par la suite « lâché l’affaire ». C’est-à-dire qu’ils ne savent pas comment l’intégrer dans leurs relations au quotidien et dans leur vie.
Pourquoi est-il si difficile de rester en lien avec son intention de vivre la CNV au quotidien ? Quels sont les petits pas concrets que nous pouvons poser pour rester en lien avec cette intention ? Découvrez dans cet article mes 5 solutions pour intégrer la CNV au quotidien.
La simplicité apparente du processus
Le processus de la CNV peut être décrit simplement (voir ma page sur le sujet) : intention de se relier à l’autre, observation des faits concrets dénuée de jugement, sentiment, besoin qui y est relié et demande claire et concrète.
La difficulté d’intégrer la CNV
Pourtant dans les faits, c’est bien plus compliqué que ça à incarner au quotidien. Effectivement, chaque étape comporte ses difficultés car chacune va à contre-courant de nos habitudes de langage.
L’intention
Quand nous communiquons avec l’autre, notre intention est-elle de nous connecter à lui/elle ? Autrement dit, est-ce que nous considérons que notre besoin est aussi important que le sien ? Est-ce que je n’essaie pas d’obtenir quelque chose de lui /elle, de l’éduquer, ou encore de lui montrer combien il a tort et moi raison (pas DU TOUT mon genre ça, noooon…) ?
Le sentiment
Savoir identifier comment nous nous sentons n’est pas toujours facile. Lors d’une séance d’initiation à la CNV, une amie me confiait ne pas savoir dire comment elle se sentait, et qu’à bien y réfléchir, elle n’y prêtait jamais attention. Notre langage nous a en effet plus habitué à analyser et juger ce qui est bien ou mal plutôt qu’à nous poser la question de comment nous nous sentons (voir mon post sur le sujet). Parler de nos sentiments peut parfois être pris pour de la faiblesse dans notre société.
Le besoin
En parlant de vulnérabilité, le mot « besoin » se pose là. Des esprits taquins diront même qu’en français le mot est associé à aller faire ses besoins… Il est tellement inhabituel dans notre langage commun qu’en langage CNV « courant » il n’est pas utilisé. A la place, nous dirons plutôt : ce que j’aime vivre, ce à quoi j’aspire, j’ai envie de,…
Est-ce que vous vous voyez dire par exemple à votre patron(ne) : « Quand tu me dis ça, je me sens triste parce que j’ai besoin de reconnaissance, peux-tu me dire ce que tu as compris ? » Peut-être qu’il/elle vous adressera un regard en coin en se demandant ce qui vous arrive (voir comment une situation similaire m’est arrivée sur ce post).
La demande
Il existe plusieurs difficultés dans la demande. En premier lieu, une des difficultés est d’oser demander, tant nous avons de peurs associées (peur d’en demander trop, du jugement de l’autre, de recevoir un refus,…). En second lieu, il s’agit de formuler une vraie demande et pas une exigence. Nous pouvons distinguer l’une de l’autre lorsque nous recevons un « non » en retour. Si nous ne pouvons pleinement recevoir ce non, peut-être étions-nous en train de formuler une exigence.
En dernier lieu, pour qu’elle ait le plus de chance d’aboutir, la demande doit être CRAAPPO (Concrète, Réaliste/Réalisable, Au présent/Actée dans le temps, Positive, Précise et Ouverte au dialogue). Fastoche ! Par exemple pour ma part, il me vient beaucoup plus facilement à l’esprit ce que je ne veux pas que l’autre fasse plutôt que ce que je veux qu’il fasse, et ainsi formuler une demande positive.
Le langage CNV : une langue (très) vivante
En résumé, le processus en lui-même est beaucoup plus compliqué à incarner et à appliquer que cela n’y paraît au premier abord. De plus, en ce qui me concerne, les personnes de mon entourage ne parlent pas ce langage (on parle de langue « girafe », l’animal symbole de la CNV), ce qui n’aide pas toujours à garder le lien avec mon intention qui est la qualité de la relation. Les neurosciences parlent d’autoroutes neuronales : c’est-à-dire que nous créons plus de connexions neuronales pour les schémas de pensée les plus utilisés. Ces schémas deviennent donc plus faciles à utiliser. Ainsi, si je souhaite que la CNV devienne plus naturelle dans mon quotidien, je dois donc la pratiquer le plus souvent possible.
A la manière d’une langue étrangère, le langage girafe est une langue vivante qui nécessite de la pratique pour être parlée couramment. Dans mon expérience, ce qui me soutient le mieux dans mon intention est une connexion régulière avec la CNV, que ce soit à travers la théorie ou la pratique.
Mes 5 petits pas concrets
En conséquence, voici mes 5 solutions qui me permettent de garder le lien quasi quotidiennement avec la CNV :
Petit pas n°1 : La pratique quotidienne de l’auto-empathie
Tout d’abord, je me demande régulièrement « comment je me sens, là maintenant ? » tout en prenant conscience de mes sensations corporelles (tensions musculaires, souffle, douleurs éventuelles), et ce au moins une fois par jour ou plus. Je relie ces sensations à mes sentiments et à mes besoins, nourris ou non. Je vois cette pratique comme un moyen de prendre soin de moi et de cultiver mon intériorité.
Petit pas n°2 : La participation à des groupes de pratique
Ensuite, je me rend à mes groupes de pratique une fois par mois. Un groupe de pratique permet aux personnes qui s’intéressent à la CNV de se retrouver régulièrement pour pratiquer la CNV à travers les exercices, l’exploration de situations vécues par des membres du groupe et de créer du lien avec d’autres pratiquants. Ces groupes permettent de rencontrer de nouvelles personnes, de partager avec elles, de se sentir appartenir à une communauté et d’avoir du soutien dans sa pratique. Faisant partie de 2 groupes de pratique auto-gérés, c’est-à-dire sans formateur certifié pour mener les séances, nous animons à tour de rôle, ce qui permet de tester la posture d’animateur. Les membres peuvent apporter des exercices et des connaissances vues lors de formations, ce qui enrichit le groupe.
Petit pas n°3 : Les cahiers d’exercice de CNV
Ensuite, je suis les cahiers « La Communication Non Violente au fil des saisons » de Sophie Grosjean (voir la vidéo de présentation), qui explorent tous les grands thèmes de la CNV. Je trouve ces cahiers très jolis et agréables à regarder. C’est un plaisir d’écrire un peu chaque jour dedans. Il existe également la collection des petits cahiers d’exercice, que personnellement je n’ai pas testé.
Petit pas n°4 : Le visionnage de vidéos Youtube
De plus, je suis abonnée aux chaînes Youtube de formateurs certifiés (voir la section « pour aller plus loin » en fin d’article). Même si je suis passive, ces vidéos m’apportent des clés de compréhension et l’envie de pratiquer au quotidien. Chaque formateur m’inspire par sa manière de voir et de transmettre la CNV, et également par sa posture.
Petit pas n°5 : Les groupes Facebook
Enfin, je fait partie de plusieurs groupes de CNV sur le célèbre réseau social. Ils permettent un lien avec une communauté de personnes qui s’intéressent à la CNV, des échanges et le partage d’informations. Certains groupes sont consacrés à l’empathie (Communication Non Violente (CNV), créé par Isabelle Padovani), d’autres à la théorie de la CNV (CNV en débat), et d’autres encore à des sujets plus vastes (La paix ça s’apprend, créé par Thomas d’Ansembourg).
L’impact de la pratique dans ma vie quotidienne
C’est ainsi qu’à la rentrée 2018, n’ayant plus du tout pratiqué la CNV pendant 2 mois et de retour dans mon groupe de pratique, j’avais beaucoup de mal dans une situation que j’explorais à me connecter à mes sentiments et à mes besoins. Je n’arrivais pas à me décoller de ce que l’autre faisait et qui me dérangeait et à revenir vers moi.
A contrario, à la rentrée 2019, après avoir beaucoup pratiqué et gardé un contact quotidien avec la CNV, je pouvais explorer de nombreuses situations de manière très fluide.
Aujourd’hui en congé maternité après l’arrivée de mon second enfant, il n’est pas toujours facile de trouver du temps pour ma pratique. Cependant, le format de certaines vidéos Youtube d’une durée de quelques minutes, ou des exercices de « La CNV au fil des saisons » permet vraiment de réserver des petits moments à ma pratique un peu chaque jour.
Et vous, quels sont vos principaux obstacles à vivre la CNV dans vos relations ? Arrivez-vous à formuler des demandes positives ? Quelles sont les petits pas concrets que vous posez au quotidien pour garder le lien avec votre intention de connexion à l’autre ? J’ai vraiment envie de partager et d’échanger avec vous, alors n’hésitez pas à partager vos réactions en commentaire !
Pour aller plus loin
Formation
Groupes de pratique
Groupes de pratiques en Rhône Alpes
Carnets de pratique
Carnets de pratique de la Communication Non Violente
« La Communication Non Violente au fil des saisons » de Sophie Grosjean
Merci Nathalie pour ce partage de 5 petits pas concrets pour ancrer et incarner la cnv dans son quotidien, cela m’a permis de me relier aussi à mon apprentissage, à m’interroger sur ma pratique, mes difficultés et donc de m’apporter de la clarté par rapport à cela !! Merci également pour les ressources et liens que tu partages ! c’est facilitant et permet rapidement d’y avoir accès !!
En ce qui me concerne je vois que je perds pied quand l’émotionnel me déborde, me submerge et me fait plonger dans mes habitudes « je me juge, je juge l’autre », quand je me coupe de la connexion avec ce qui est vivant en moi !
Les situations récentes (Noel oblige :)) où j’ai observé cela c’est en famille, quand nous sommes tous réunis avec mes 4 grands enfants et que les mécanismes relationnels qu’ils affectionnaient dans l’enfance se remettent en place.
Je mesure les petits pas à faire sur un long et magnifique chemin !!